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Jung et la gnose

Invité : Françoise BONARDEL

2022/12 - Décembre

Le propos

Avec Françoise Bonardel, philosophe, professeur émérite des universités et spécialiste de la gnose, de l’hermétisme, de l’alchimie et du bouddhisme, nous explorons les rapports, étranges et complexes, de Jung avec la gnose.

En effet, Jung a fait de très nombreuses références à la gnose dans son œuvre. Il s’est intéressé aux Gnostiques dès les années 1910 et il en vint à considérer les gnostiques comme les premiers explorateurs de l’inconscient.

Des phrases clés

« Françoise Bonardel, une intellectuelle incontournable du paysage jungien contemporain. »

« J’ai découvert Jung grâce à Gilbert Durand, le grand sociologue et anthropologue de l’imaginaire qui avait accepté de diriger ma thèse de doctorat sur l’alchimie … Michel Cazenave m’avait demandé d’écrire l’article sur Jung et l’alchimie dans le Cahier de L’Herne consacré à Carl-Gustav Jung. »

« Il y a dans l’œuvre de Jung des trésors encore, pour une part, inexplorés et qui seraient d’une grande utilité par rapport aux questions cruciales auxquelles nous sommes aujourd’hui confrontés. »

« Une caractéristique de la démarche de Jung est d’avoir rétabli le dialogue, du point de vue psychologique qui était le sien et avec un autre regard, avec des traditions anciennes (la gnose, l’alchimie). C’est une démarche qui lui est propre … sa volonté d’extraire, des témoignages anciens, ce qui pourrait permettre d’éclairer le fonctionnement du psychisme et en particulier du psychisme inconscient … Jung en arrive à penser que les textes gnostiques sont le témoignage d’une confrontation avec l’inconscient … »

« Les Gnostiques sont des témoins, au début de l’ère chrétienne, d’un grand bouleversement qui s’est produit lorsque le monde païen a été confronté au monde chrétien, à l’émergence du Christianisme … un bouillonnement spirituel et intellectuel dont l’existence des gnoses témoigne ... Les Gnostiques sont des chrétiens dualistes qui considèrent que ce monde dans lequel ils ont été jetés, est un cloaque, une prison ; ils ne s’émerveillent en rien de la création … la gnose est une connaissance révélée et salvatrice qui permet de s’arracher à ce monde de ténèbres et de rejoindre le Plérôme (qui signifie la plénitude), c’est-à-dire la patrie originelle de l’âme dont une série de catastrophes cosmiques et métaphysiques l’ont éloignée … c’est donc un scénario extrêmement dramatique qui témoigne d’une inquiétude de l’âme humaine et d’un désir de salut dont le Christ est l’incarnation mais un Christ revu, qui épouse plutôt la figure du Sauveur. »

« La découverte de la bibliothèque de Nag Hammadi, en 1945, n’avait pas encore eu lieu …. La connaissance que Jung avait des textes gnostiques était aussi accomplie que possible. Il avait lu (souvent dans le texte grec ou latin) et médité la quasi-totalité des textes gnostiques qui étaient à l’époque disponibles … il avait aussi accès à la gnose à travers les travaux de Gilles Quispel (historien des religions et de l’église primitive) qui a accompagné Jung dans sa lecture et ses recherches … En 1955, Jung s’est vu offrir le papyrus original de l’Evangile de la Vérité en hommage à son apport à la compréhension de ces mouvements gnostiques encore très mal connus. Ensuite, ce texte a été restitué au musée copte du Caire. »

« On connaît les Gnostiques par deux sources différentes : par leurs écrits et à travers les témoignages des Pères de l’église, Irénée de Lyon, Hippolyte de Rome, Tertullien, Clément d’Alexandrie … donc à travers des hérésiologues qui considèrent les gnoses comme des hérésies. »

« A première lecture, on peut penser que les Gnostiques sont des psychopathes, des gens déréalisés, mais ils ont une quête psychologique et spirituelle … Jung aborde les Gnostiques en psychologue et cherche, dans les textes, les mouvements de l’âme humaine qui cherche à sortir de sa servitude. »

« Le livre de Jung - L’homme à la découverte de son âme – c’est en quelque sorte la feuille de route que Jung a tracée pour l’homme contemporain, pour qu’il retrouve le contact avec son âme. »

« La psychologie des profondeurs, c’est une gnose ET ça n’en est pas une … La Gnosis est une connaissance révélée de type illuminatif et salvatrice, libératrice ; ce n’est pas une connaissance rationnelle ; par la gnose, on franchit un seuil de conscience … Donc, en ce sens, on peut dire que l’exploration des profondeurs va nécessairement impliquer des changements de plan de conscience et conduit à une connaissance de plus en plus approfondie de soi-même et de son intégration dans le monde ; et c’est une conscience libératrice, et c’est le but de la psychologie analytique … Et en même temps, la psychologie analytique n’est pas de type gnostique si l’on se réfère à l’univers des Gnostiques, à leur mythologie, à leur cosmologie, à leur théologie, qui reposent sur un dualisme radical, sur la certitude que l’âme est définitivement égarée en ce monde. »

« Finalement, Jung est beaucoup plus proche des Alchimistes que des Gnostiques, car dans l’alchimie, on transforme. »

Conseils de lecture

Jung et la gnose par Françoise Bonardel – Editions Dervyhttp://www.francoise-bonardel.com/

Cahier Jung Editions de l’Herne

Site de Françoise Bonardel http://www.francoise-bonardel.com/

Ecrits gnostiques, La bibliothèque de Nag Hammadi sous la direction de Jean-Pierre Mahé et Paul-Hubert Poirier – Editions Bibliothèque de la Pléiade