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Faisons connaissance avec Jung (2)

Invité : Reine-Marie HALBOUT

2020/04 - Avril

Le propos

Reine-Marie HALBOUT, psychologue clinicienne et psychanalyste jungienne est membre de la SFPA (Société française de Psychologie analytique) et superviseur.

Elle est présidente de la revue Les Cahiers Jungiens de psychanalyse;

En une série de trois émissions, elle nous présente "Carl-Gustav JUNG, sa vie, son œuvre". Cette émission est la deuxième de cette série.


Des phrases clés

« La crise que Jung traverse va prendre une forme particulière. Jung est totalement désorienté, il accepte de se confronter à des figures parfois terribles et d’autres plus secourables … Dans Le Livre rouge, il écrit ce qu’il entend et il dessine ce qu’il voit … Jusqu’en 2009, nous ne connaissions que peu de choses sur cette période particulière … »

« Pour Jung, il ne s’agissait pas d’art mais de donner une forme aux contenus de l’inconscient. »

« Cette période a été la plus féconde de sa vie et contient en germe toute l’élaboration de son œuvre future. »

« Dans l’histoire, il y a très peu d’équivalents à ce Livre rouge : les livres de dessin de William Blake, Le livre de mes rêves de Fellini qui a fait une analyse jungienne avec Ernst Bernhard dans les années 60. »

« La crise conduit à la créativité quand les choses se passent bien. Les artistes en paient parfois le prix fort … Entre la crise et la créativité, le rêve est très important. »

« C’est dans l’expérience du Livre rouge, avec cet inconscient matriciel qui lui permet d’élaborer sa méthode thérapeutique, que Jung expérimente les rêves, les symboles … Sur fond d’énergétique psychique, Jung s’avance dans une interprétation constructive des symptômes et se démarque de plus en plus de la position causaliste de Freud, qu’il juge réductrice. »

« En 1921, parait Types psychologiques, le premier livre scientifique rédigé après plusieurs années de silence … Le lire comme un essai de théorisation de ce qu’il a vécu, son expérience vécue à l’intérieur de cette dialectique du moi et de l’inconscient … et aussi comme une tentative de comprendre ce qui l’a séparé de Freud, notamment dans la dynamique Extraversion/Introversion … Dans ce livre, on y croise Platon, Socrate, Héraclite, Kant, Schiller, Schopenhauer, Nietzsche, Rousseau, Goethe, Darwin, Otto Gross et encore bien d’autres … Il faut attendre le chapitre X pour les huit types psychologiques où Jung arrive enfin ! Jung s’inscrit dans un courant de pensée très ancien, il cite ses sources et rend à César ce qui est à César. »

« La psychologie de Jung n’est pas réduite à une psychologie du Moi, ni à une caractérologie … »

« Pour Jung, les rêves sont déterminants … Il a fait des choix de vie à partir de ses rêves et de grands choix. »

« Citations de JUNG : Tous les problèmes qui me préoccupèrent humainement ou scientifiquement furent anticipés ou accompagnés par des rêves … Pour moi, les rêves sont nature qui ne recèlent la moindre intention trompeuse et qui disent ce qu’elle a à dire aussi bien qu’elle le peut, comme le fait une plante qui pousse ou un animal qui cherche sa pâture. »

« En cela, Jung se relie à des siècles de relation aux rêves dont nous avons malheureusement perdu la pratique, dont les Egyptiens et les Grecs s’étaient fait des spécialités … Toutes choses que l’avènement des sciences a eu tendance à considérer comme un sous-produit, comme quelque chose qui n’avait pas de valeur … Freud reprend, lui aussi, la grande tradition avec L’Interprétation des rêves. »

« Quelques différences entre Freud et Jung sur le rêve : Pour Freud, tout rêve est réalisation de désir refoulé dont la satisfaction est interdite à l’état de veille. Le moteur du rêve, le désir, trouve ses racines dans la vie infantile et en particulier dans la problématique œdipienne. L’interprétation va utiliser les associations de la personne qui donne le récit du rêve. On la prie d’associer aussi librement que possible et le thérapeute va pouvoir proposer une interprétation … Avec Jung, on est sur un autre registre. Le rêve dit ce qu’il a à dire mais il le dit dans un langage codé, symbolique, qui est le langage de l’inconscient. Jung travaille le rêve au plus près du rêve et revient aux images du rêve qui sont chargées d’une énergie particulière et peuvent renseigner sur ce que le rêve a à dire. »

« Jung interprète les rêves sur différents plans : le plan de l’objet … le plan du sujet (quelle partie de vous, ce qui apparaît dans votre rêve, réanime ?) … le plan du transfert (pourquoi ce rêve-là est apporté par ce patient à ce thérapeute ?). Ces trois plans se répondent, se nourrissent les uns les autres … Et puis il y a l’amplification, une méthode qui consiste à faire une analogie entre les matériaux que le rêve produit et les données comparables à ces images oniriques, telles qu’on les trouve dans la mythologie, le folklore, l’anthropologie, les contes, les religions, les événements culturels du moment qui vont ouvrir l’analysant à une compréhension plus riche de son rêve. »

« Dans l’opéra baroque, le sommeil et le rêve sont une des figures codifiées représentant un moment crucial de l’intrigue, un moment où le héros va vivre le passage d’un monde à l’autre, mais surtout d’une compréhension de la situation à une autre. Et c’est un moment qui ouvre à une résolution. »

« L’interprétation du rêve est un tâtonnement à deux. »

« Il est très important d’entendre la fonction compensatrice du rêve … Il s’agit de retrouver un juste équilibre … Comme une régulation autonome du système psychique visant à rétablir approximativement une harmonie entre le conscient et l’inconscient … Une richesse du travail sur le rêve, une ouverture sur laquelle le rêve engage, par son pouvoir d’information et de transformation. »

Conseils de lecture

Le Livre rouge de Carl-Gustav JUNG Editions La Compagnie du Livre rouge

Les Types psychologiques par Carl-Gustav JUNG – Editions Georg

Rêver sous le IIIème Reich par Charlotte BERADT – Editions Payot

Le livre de mes rêves par Federico FELLINI – Editions Flammarion